Les membres d’une association de développement de l’économie du Zimbabwe (Campfire1) ont décidé d’importer le trophée d’un cerf écossais. Ils entendent par là protester contre l’hypocrisie d’un projet de loi qui interdirait l’importation de trophées africains au Royaume-Uni.
Leur action intervient alors que la proposition de loi interdisant l’importation de trophées de chasse est présentée à la Chambre des communes pour la cinquième fois ! Le projet de loi a été adopté en première lecture, ce qui signifie que la législation n’est plus qu’à deux étapes de son adoption.
Une opposition farouche des pays d’Afrique australe
Les projets de loi précédents se sont heurtés à l’opposition farouche de six pays d’Afrique australe, qui ont qualifié la position du Royaume-Uni de « raciste et de « néo-coloniale par nature. » Ces pays estiment, à juste titre, qu’ils sont mieux placés que les députés britanniques pour juger de l’état de la faune de leurs pays et de ce que la chasse-conservation peut leur apporter.
Shylock Muyengwa, directeur des programmes de Resource Africa, a déclaré : « Les mêmes vieux préjugés, la même hypocrisie – les politiciens britanniques recommencent avec un autre projet de loi contre-productif, marquant la cinquième tentative d’interdire les importations de trophées de chasse en trois ans.«
« Quand apprendront-ils que c’est l’Afrique qui sait le mieux comment gérer sa faune sauvage ? Quand apprendront-ils à respecter et à consulter nos gouvernements ? ».
De nombreux spécialistes africains sont vent debout contre cette loi. Parmi eux, le docteur Mike Musgrave qui déclare « C’est le dernier souffle d’une élite qui pense que la conservation de la faune et de la flore africaines relève encore de la compétence du ministère des colonies.«
Des éléphants à Hyde Park ?
Le ministre de l’environnement du Botswana, Dumezweni Mthimkhulu, s’est immiscé dans les débats sur l’importation de trophées de chasse au début de l’année, en offrant au gouvernement britannique un troupeau d’éléphants. Son but est de faire prendre conscience aux anglais que la vie des populations rurales dans son pays est gravement handicapée par la croissance incontrôlée des éléphants. Ce pays compte maintenant 100 000 pachydermes. « Je veux que les Britanniques comprennent ce qu’est la vie aux côtés des éléphants, qui envahissent mon pays. »
—> Lire aussi : Interdire la chasse aux trophées est une très mauvaise idée pour la biodiversité
Un sondage assez instructif
Comme d’habitude, les politiques qui présentent cette proposition de loi s’appuient sur un sondage qui montre que les anglais sont largement favorables à cette interdiction même si cela devait mettre en péril l’économie des pays concernés. Difficile de faire plus condescendant et méprisant ! Du haut de sa supposée supériorité morale, le britannique juge qu’il est mieux placé que les africains pour juger de ce qui est bien ou pas pour les pays d’Afrique. Ce sondage démontre aussi que l’occidental qui vit confortablement est prêt à interdire aux africains de développer leur économie si cela contrevient à ses principes moraux.
—> Lire aussi : Comment la chasse conservation sauve des espèces en danger
Un projet de loi illibéral et préjudiciable aux efforts de conservation
Le groupe de réflexion Institute of Economic Affairs (IEA) a qualifié en août la promesse du parti travailliste d’interdire l’importation de trophées de chasse « d’illibérale et préjudiciable aux efforts de conservation ».
Dans l’article « Elephant in the room2« , le directeur de l’African Wildlife Economy Institute, Francis Vorhies, déclare : « La chasse au trophée, lorsqu’elle est correctement réglementée, peut générer des revenus pour la conservation, créer des incitations économiques pour la protection de l’habitat, soutenir les espèces cibles et leurs habitats, et contribuer aux moyens de subsistance locaux. »
Une étude de l’université d’Oxford démontre les bienfaits de la chasse aux trophée pour l’Afrique
Une étude3 récente de l’université d’Oxford indique d’ailleurs que la loi britannique sur l’interdiction d’importation des trophées de chasse causerait plus de tort que de bien. Cette étude extrêmement intéressante et fouillée est à retrouver sur l’onglet Références de Chroniques Cynégétiques.
Le journal de l’université d’Oxford en fait un résumé à lire ici : New analysis indicates UK hunting trophies law would cause more harm than good
Voici deux de ses conclusions :
« La chasse légale pour les trophées ne s’est avérée être une menace majeure pour aucune des 73 espèces et sous-espèces importées au Royaume-Uni. »
« La chasse au trophée offre des avantages environnementaux et sociaux significatifs. Il s’agit notamment de la protection des zones sauvages contre la conversion à l’agriculture, de la fourniture de ressources pour prévenir le braconnage, de revenus et d’emplois pour les populations autochtones et les communautés locales, de la fourniture de viande pour les communautés locales et de l’augmentation de la population d’espèces menacées. Il est important de noter que ces avantages sociaux s’étendent également aux régions où les possibilités de tourisme commercial sont limitées. »
- Campfire Association Zimbabwe ↩︎
- Elephant in the Room: Why a trophy hunting ban would hurt conservation and development ↩︎
- Evaluating key evidence and formulating regulatory alternatives regarding the UK’s Hunting Trophies (Import Prohibition) Bill ↩︎
En savoir plus sur Chroniques cynégétiques
Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.
