Le 3 mai 2025, une trentaine de chasseurs des sociétés de chasse de l’Espérou, de Camprieu et du Val d’Aigoual ont décidé de se retrousser les manches et de nettoyer un vallon envahi par une décharge sauvage.
En une matinée, ils ont évacué presque deux tonnes de déchets abandonnés ici depuis trop longtemps. Ces chasseurs en avaient assez de voir la nature qu’ils aiment défigurée par ce dépôt sauvage ; ces déchets abandonnés au cœur d’un parc national leur étaient devenus insupportables. C’était une véritable pollution visuelle et esthétique qui devait disparaître. Comme le dit si bien Eugénie Bastié, « L’écologie doit à tout prix comprendre une dimension esthétique et lutter contre le laid, une pollution au moins aussi grave que celle de l’air, de l’eau et des cieux. »







Ils ont donc décidé d’agir.
Tout ceci a été fait sur leur temps libre, à leurs frais, avec leurs véhicules et leur matériel. De 7 à 77 ans, tous ont participé avec la ferme conviction de faire ce qu’il fallait. Ils n’attendent ni remerciements, ni la une des journaux, ni des couronnes de fleurs ou une quelconque reconnaissance officielle. Il semble que le courage et le sens des responsabilité fassent partie de l’ADN des gens de l’Espérou puisque ce village fut fondé au moyen-âge par quelques serfs affranchis par leur seigneur pour faits de courage.
Quelques enfants ont participé à cette opération ; leurs parents les sensibilisent ainsi au respect que l’on doit à la nature. C’est aussi cela la transmission, elle passe aussi par les travaux pratiques.

C’est une démonstration supplémentaire, s’il en fallait, que la véritable écologie, la véritable protection des espaces naturels est celle qui vient de la base, des habitants et non de ceux qui édictent des normes depuis des bureaux confortables ou qui invectivent sur les réseaux sociaux.

« Nous les chasseurs, nous sommes souvent dans la forêt, on l’aime, on doit aussi la nettoyer. De plus, ici c’est touristique, tous ces déchets ça ne donnait pas une bonne image de la commune. »
Pascal Bourgade, président de la société de chasse de L’Espérou

Il faut aussi noter que cette opération a été décidée en commun avec la fédération de chasse du Gard et en particulier avec Nicolas Pagès, technicien cynégétique de cette FDC, où il s’occupe de la gestion de la grande faune. Nicolas est chasseur mais aussi photographe animalier de talent et auteur de deux superbes livres1, L’Aigoual, la nature et les hommes et Grande faune en Cévennes, tous deux parus chez Complices Éditions.
Le parc national ne se sent pas concerné.
Le parc a été créé en 1970, il couvre 93500 hectares, 152 communes et compte 71000 habitants. Il est un des deux seuls parcs nationaux à être habité. Son autre caractéristique est que la chasse y est pratiquée. C’était d’ailleurs une des conditions exigée par les habitants lors de la création et cela a largement contribué à son acceptation dans la région.





Le parc des Cévennes, c’est aujourd’hui plus de 200 employés répartis en trois services2 :
- Connaissance et veille du territoire
- Développement durable
- Accueil et sensibilisation.
Le service développement durable est en charge de nombreuses responsabilités dont la politique de préservation des paysages.
Il semblerait que faire disparaître une décharge sauvage située en plein coeur du parc entre dans le champ de la politique de préservation des paysages. Malheureusement ce n’est pas le cas puisque, malgré les sollicitations répétées des communes et des chasseurs, les agents du parc ne sont jamais venus. Ce genre de taches pratiques et d’effet immédiat sont-elles indignes d’eux ?
« On en a plusieurs fois parlé au Parc et ils ne sont jamais venus nettoyer en disant que ce n’était pas leur rôle. »
Pascal Bourgade, président de la société de chasse de l’Espérou
Cela illustre la déconnexion grandissante entre les agents du parc et la population. À sa création, les agents étaient recrutés localement et connaissaient tout le monde dans les villages et les hameaux ; ce n’est, hélas, plus le cas.
L’Espérou, un village de chasseurs.
Pour ceux qui disent que les ruraux n’aiment pas la chasse, l’exemple de l’Espérou est assez emblématique du contraire : 150 habitants et 45 chasseurs soit 1/3 de la population !
Sur ces hauteurs, on chasse plutôt le grand gibier, cerfs, chevreuils, sangliers, mouflons (introduits ici par les chasseurs dans les années 50) mais il y a aussi quelques passages de palombes et de grives. Tous ont conscience de la chance qu’ils ont de pratiquer leur passion dans un tel environnement et de tels panoramas.
Un grand bravo et un grand merci aux chasseurs des ces trois société de chasse !
- https://complices-editions.eu/c/auteurs/nicolas-pages ↩︎
- Parc national des Cévennes Missions et organisation ↩︎
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