Par Renaud Desgrées du Loû, guide de chasse professionnel en Afrique et en Asie.

« Trophy hunting is the best for conservation » affirment les organisations de chasse et les chasseurs professionnels qui organisent ou guident des chasses à l’étranger. Oui, la chasse aux trophées est certainement le moyen le plus efficace pour assurer l’avenir de la faune sauvage sur une région donnée. 

Cette activité est tellement efficace en matière de protection de la biodiversité que les grandes organisations de conservation de la Nature comme l’UICN (l’Union Internationale de la Conservation de la Nature) et le WWF international l’acceptent même pour des espèces rares (ou qui l’étaient) comme les Markhors. Ils l’appellent dorénavant la « chasse-conservation ».

Qu’est-ce que la chasse aux trophées ?

Cette activité consiste à tuer (prélever ou récolter. J’assume le sens des mots) de vieux animaux, très généralement mâles, porteurs de beaux trophées. Le trophée étant le souvenir de l’action de chasse que le chasseur récupère et rapporte chez lui en souvenir de son séjour de chasse. Ce peut être, les seules cornes des bovidés ou les bois des cervidés. Ce peut-être aussi la cape (la peau de la tête et du cou), ou la peau entière qui est préparée (salée, séchée) sur place et qui sera naturalisée ultérieurement par le taxidermiste du chasseur dans son pays d’origine accompagnée des documents nécessaires (licence, certificat vétérinaire et éventuel CITES). 

La viande est alors récupérée par les populations locales qui participent à la lutte anti-braconnage, à la chasse ou qui vivent sur la zone de chasse.

J’entends souvent un argument idiot ; “en tuant les animaux porteurs des plus beaux trophées, les chasseurs appauvrissent la génétique des espèces chassées !” Tout d’abord la notion de beauté est très subjective. Et même si effectivement les  guides de chasse font tirer les plus vieux animaux qui sont, très généralement, porteurs des plus grands et donc, pour eux, des plus beaux trophées, un vieil animal a eu largement le temps de disperser sa génétique avant qu’il ne soit tué. Car les plus vieux (et beaux) mâles sont généralement écartés de la reproduction par les plus jeunes et les plus dominants. Les vieux animaux sont affaiblis et méfiants. Ils ont donc peur de combattre. Ils vivent seuls ou entre vieux mâles. On les appelle les “solitaires”. 

Pourquoi certains veulent-ils interdire l’importation des trophées ?

Pourquoi les écologistes occidentaux et certaines organisations de conservation de la nature veulent-ils interdire l’importation des trophées de chasse ?

Pour des considérations purement “animalistes” car ils sont radicalement opposés à la chasse. C’est dogmatique ! Ces ONG environnementalistes n’acceptent pas la chasse comme une activité de plaisir. Pour elles, la chasse sportive ne se limite qu’au plaisir de tuer. Ce qui n’est pourtant pas le seul but du chasseur, sinon il irait travailler dans un abattoir. La plupart des chasseurs qui voyagent le font pour le dépaysement, pour la découverte d’autres paysages, pour rencontrer d’autres cultures ou d’autres espèces animales. Ils le font pour la pratique de cette activité qui peut constituer un véritable challenge sur le plan sportif (notamment en haute montagne ou en forêt primaire) ou pour l’adrénaline face à une situation stressante ou dangereuse. 

Vouloir interdire l’importation des trophées de chasse en Europe effacerait tout simplement des centaines de milliers d’hectares de réserve de biodiversité en Afrique et ailleurs dans le monde. Car la surface des zones de chasse est très fortement supérieure à tous les Parcs Nationaux. Si la chasse aux trophées était interdite le résultat serait celui que vit le Kenya depuis la fermeture de la chasse, au début des années 80. Les zones de chasse ont disparues et sont devenues des régions d’élevage bovin et/ou transformées pour l’agriculture. Le Kenya est aujourd’hui le deuxième pays producteur de fleurs au monde après la Hollande. Il est donc facile de comprendre pourquoi la population d’éléphants au Kenya est rapidement passée de plus de 100.000 à moins de 22.000 aujourd’hui. Pendant que tous les pays de l’Afrique Australe (Namibie, Botswana, Afrique du Sud, Zambie. Zimbabwé, Mozambique et Tanzanie, tous ouverts à la chasse), conservaient une population située autour de 400.000 éléphants.

Tourisme de chasse ou tourisme de vision ?

Certaines ONG environnementalistes pensent qu’il suffirait de transformer les zones de chasse en réserves pour le tourisme de vision. C’est méconnaître les zones de chasse où la vision est souvent difficile et l’atmosphère parfois insoutenable à cause de l’humidité et des temperatures élevées. Sans parler de la présence des insectes, des maladies véhiculées par ces derniers (paludisme, dengue, trypanosomiase,…) et de l’inconfort dû à l’éloignement.

De plus, il faut prendre en compte que, pour arriver au même résultat financier, il faut des milliers de touristes qui vont déranger la faune, qui vont nécessiter des hôtels, des routes, des véhicules et que tout ceci est extrêmement nuisible à la biodiversité.

Le Botswana qui dispose de la plus forte densité d’éléphants au monde avec plus de 120.000 spécimens à bien essayé d’arrêter la chasse mais le nouveau président s’est retrouvé face au besoin de la réouvrir. Non seulement pour valoriser les espèces auprès des populations locales qui y trouvent des activités et des bénéfices mais aussi pour maintenir un niveau suffisant de pression de la faune sauvage afin de préserver la végétation et les cultures.

Les chasseurs rapportent aussi beaucoup plus financièrement que les groupes de touristes avec des dérangements moindres.

Le Parc National de Chobe, le delta de l’Okavango et le Désert du Kalahari au Botswana sont consacrés au tourisme de vision pendant que le reste des régions sauvages sont des zones (blocs) de chasse. Ainsi tous les grands espaces sauvages du Botswana sont valorisés pour le compte de la faune sauvage.

La liste CITES

La plupart des gens et surtout les politiciens qui veulent interdire l’importation des trophées qui sont dans la liste de la CITES ne connaissent pas l’origine de cette liste. La CITES (Convention on International Trade of Endangered Species) issue de la Convention de Washington) a été créée pour gérer le commerce (le T de Trade) de la faune sauvage et empêcher qu’il soit à l’origine de la disparition d’une espèce. 

Effectivement le braconnage des éléphants dès les années 70 et donc le commerce incontrôlé de l’ivoire a faillit faire disparaître l’éléphant d’Afrique. Aujourd’hui avec la prise de conscience des pays concernés ce pourrait être l’inverse. Si les pays de l’Afrique Australe ne peuvent plus gérer leurs populations animales (éléphants en tête) et ainsi en trouver des bénéfices, comment justifier un aussi grand nombre de spécimens ? Ils pourraient être tentés de faire comme au Kenya et ne garder que quelques centaines d’éléphants dans leurs parcs nationaux pour les montrer aux touristes. 

Laissons les pays africains décider !

La chasse aux trophées n’est pas un commerce libre puisque le pays est souverain en la matière. Le faible nombre de spécimens récoltés par la chasse sportive les valorisent auprès des communautés locales ce qui permet l’augmentation des populations animales. 

C’est en ce sens que le Botswana offre, très sérieusement, à l’Allemagne, 20 000 éléphants. 

Car en voulant interdire l’importation des trophées de chasse inscrits au CITES, non seulement l’Allemagne, mais aussi la Belgique, l’Angleterre, la France et d’autres pays tentés de faire pareil, font du néocolonialisme en imposant leurs propres visions de la gestion de la faune sauvage à un pays d’Afrique souverain mais décrédibilisent leurs propres signatures auprès de la CITES. Car tous ces pays se réunissent, tous les deux ans, pour discuter et décider du niveau de protection des espèces de faune et de flore. 

Il est facile, vu d’Europe, de décider ceci ou cela sans vivre dans ces pays et sans connaître les véritables impacts des grands prédateurs et des pachydermes sur la vie des populations locales. 

Let Africa live !

Laissons vivre l’Afrique !

Un commentaire sur « Interdire la chasse aux trophées est une très mauvaise idée pour la biodiversité »

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