Le Conseil d’État vient de suspendre les arrêtés ministériels autorisant la capture d’alouette des champs. Il s’illustre une nouvelle fois par son incohérence et sa soumission aux dogmes antichasse. Le Conseil d’État étant la plus haute juridiction administrative, il n’y a pas de recours possible. La saison est donc terminée avant d’avoir commencée.

Un arrêté ministériel pourtant rigoureux

Forts des décisions précédentes du Conseil d’État, le ministère les les fédérations de chasse avaient rédigé un arrêté ministériel1 rigoureux et suffisamment restrictif qu’ils estimaient inattaquable.

  • Une saison limitée du 1er octobre au 20 novembre, dans 3 départements seulement.
  • Déclaration de tous les prélèvements y compris des éventuelles captures accidentelles d’autres espèces.
  • Chasse sur autorisation individuelle, avec formation spécifique obligatoire.
  • Pantes implantées uniquement sur des postes qui existaient déjà en 1986, présence du obligatoire du pantayre…
  • Et surtout un quota de prélèvement inférieur au 1% de la mortalité naturelle de l’espèce, ce qui ne pénalise pas les effectifs reproducteurs.
  • Une sélectivité de plus de 99% démontrée par l’expérimentation conduite en 2023-2024.
  • Des contrôles conduits par les services préfectoraux et l’OFB.

En effet, il fallait être conforme aux dérogations acceptées par la directive oiseaux. Celles-ci sont possibles si :

  • les prélèvements sont mesurés et ne menacent pas l’état de conservation de l’espèce. C’est le cas.
  • la technique de piégeage est sélective et que les prises accidentelles d’autres espèces sont négligeables. C’est le cas.
  • si la chasse est réglementée, limitée dans le temps et contrôlée. C’est le cas.
  • Et qu’il y a absence d’autres « solutions satisfaisantes » pour obtenir le même résultat, c’est à dire chasser des alouettes. C’est LE point faible sur lequel les opposants ont attaqué. Car il existe une autre solution satisfaisante, la chasse à tir. Les opposants ont donc utilisé la chasse à tir pour détruire les pantes ! Ce qui est un comble pour des opposants irréductibles à toute forme de chasse.

Une victoire pour One Voice et la LPO

Ces deux associations ont encore une fois porté leur combat au niveau juridique et l’ont gagné. Leurs arguments sont abracadabrantesques mais ils ont été retenus par le juge. LPO et One Voice se sont bien coordonnées, leurs attaques sont complémentaires et mettent l’accent sur la non conformité à la « directive oiseaux » et le fait qu’il existe une autre « solution satisfaisante ».

Pour One Voice, il n’y a pas de preuve de la sélectivité de la capture aux pantes (alors que l’expérimentation. conduite en 2023-2024 démontre le contraire) et que ce mode de capture respecte la notion de « petite quantité » puisque, selon One Voice, rien ne permet d’estimer le taux de mortalité annuelle de l’espèce. Dans ce cas, rien ne permet, non plus, d’estimer que l’espèce serait en danger. Enfin, ce mode de capture ne respecterait pas la directive 2009/147/CE dite directive oiseaux.

Pour la LPO, l’arrêté ministériel porte une atteinte grave aux intérêts qu’elle défend (quels intérêts ?), il est en contradiction avec la directive oiseaux et autorise la chasse d’une espèce en mauvais état de conservation. Encore une fois, nos opposants et le juge semblent ignorer qu’il s’agit d’une espèce migratrice qui se porte bien puisqu’elle est classée en LC (least concern) par l’UICN.


Rappelons quand même que la population européenne d’alouette des champs est estimée entre 25 millions et 55 millions de couples nicheurs selon BirdLife International qui n’est pas vraiment un organisme pro-chasse, ce qui classe l’espèce parmi les plus communes du continent. La population nicheuse d’alouettes est comprise, à l’échelle de la France, entre 1,3 et 2 millions de couples. L’arrêté ministériel n’autorisait la capture que de 100 000 oiseaux, autrement dit une goutte d’eau.

La décision du Conseil d’État

La juridiction administrative appuie sa décision de la manière suivante :

  • L’arrêté et susceptible de porter une atteinte grave aux intérêts que défendent les requérants (One Voice, LPO)
  • Possibilité de confusion entre alouettes sédentaires (quasi menacées) et alouettes migratrices (préoccupation mineure)
  • Selon la directive oiseaux, les états membres doivent interdire « le recours à tous moyens, installations ou méthode de capture ou de mise à mort massive ou non sélective ou pouvant entraîner localement la disparition d’une espèce. »
  • Les méthodes traditionnelles de chasse sont susceptibles de constituer une exploitation judicieuse de certains oiseaux mais l‘objectif de préserver ces méthodes ne constitue pas un motif de dérogation.
  • Le caractère traditionnel d’une méthode de chasse ne suffit pas, par lui-même, à établir la validité d’une dérogation à la directive oiseaux.
  • Au-delà de l’objectif de la capture en vue de la consommation humaine à laquelle il peut être pourvu notamment par la chasse à tir […] le motif de la dérogation réside principalement dans l’objectif de préserver l’utilisation d’un mode de chasse constituant une pratique traditionnelle ne saurait à lui seul constituer de l’absence d’autres solutions satisfaisantes.

La réaction de la FNC

La FNC a publié un communiqué dans lequel elle s’offusque de cette décision mais quelle est l’utilité d’un tel communiqué ? Encore une fois, nos instances ont été désavouées et cela n’est pas rassurant car nous savons tous que l’étape suivante est l’attaque contre les palombières. Nous espérons qu’un comité stratégique s’est immédiatement réuni pour anticiper et préparer une défense à la hauteur des enjeux…

Le silence et l’inaction de ceux qui affichent dans leurs statuts qu’ils existent pour défendre la chasse, CIC France, Saint-Hubert club de France, le tout nouveau chapitre français du Safari Club International doit nous interroger quant à leur utilité.

Il faut aussi noter que les seules victoires récentes des chasseurs sont dues à des associations indépendantes de nos structures fédérales (UNACOM, par exemple). Il est peut-être temps d’entrer en résistance.

Une décision idéologique.

Le Conseil d’État s’illustre encore une fois par son incohérence et sa soumission aux dogmes antichasse.

Les chasses traditionnelles ne sont pas un sujet technique ou environnemental mais politique. Il n’y a rien de plus écologique que ces modes de chasse (glu, pantes, pantières, tenderies…), pas de plomb dans la nature, aucun danger puisqu’aucune arme à feu n’est utilisée et on ne prélève que de petites quantités d’oiseaux. En attaquant ces chasses, nos opposants confirment donc qu’il ne s’agit ni de sécurité, ni d’environnement, ni de préservation des espèces mais bien de détruire un patrimoine régional et d’éradiquer l’identité dont il est un des piliers.

Rappelez-vous la déclaration de Barbara Pompili après l’interdiction de la glu « une victoire pour la biodiversité ! » Compte tenu du nombre extrêmement faible d’oiseaux capturés, du fait qu’une grande partie était relâchée en fin de saison et que les populations de turdidés sont estimées à 700 millions d’individus en Europe, cette déclaration était, pardonnez-moi l’expression, du « foutage de gueule » et même une provocation !

Lorsque le juge déclare que « le caractère traditionnel d’une méthode de chasse ne suffit pas, par lui-même, à établir la validité d’une dérogation à la directive oiseaux. » et plus loin « l’objectif de préserver un mode de chasse constituant une pratique traditionnelle » n’est pas suffisant pour constituer une dérogation.

Comment va-t-il falloir expliquer à ces déracinés des grandes villes que le but n’est pas tant de prélever des oiseaux que de vivre comme on l’entend, en accord avec nos racines et notre identité !

Il faut aussi leur dire que nous ne voulons surtout pas leur ressembler et adopter leur mode de vie fait de béton, d’asphalte, d’escalators, d’écrans, de superficialité, d’égotisme exacerbé, de livraisons Uber… Tout cela dans un monde uniforme, où tout ressemble à tout et dont les habitants ne peuvent pas comprendre ce qui sort de leur monde étroit et qui ne leur ressemble pas.

Avec cette décision, le Conseil d’État prend ouvertement le parti de Métropolia contre Périphéria pour faire référence au titre du livre du géographe Christophe Guilluy. Le fossé se creuse, en effet de plus en plus entre les habitants des métropoles et les autres. Il y a maintenant, non seulement une incompréhension, un méconnaissance, mais aussi la volonté des uns d’imposer aux autres leur mode de développement et leur conception du monde si tant est que l’on puisse appeler comme cela « leur pensée unique issue d’un bouillon de culture uniforme »2.

Le pouvoir des juges

On peut aussi s’étonner du pouvoir exorbitant qu’ont les juges aujourd’hui dans notre société. Comment se fait-il que Gilles Péllissier, petit bonhomme gris, puisse décider d’effacer un pan de patrimoine d’un trait de plume ? D’où lui vient cette autorité ? Qui est-il pour avoir droit de vie et de mort sur nos identités régionales ? C’est le moment de lui rappeler qu’il a écrit un ouvrage sur le principe d’égalité en droit public et de lui dire que les habitants des régions rurales aimeraient se sentir égaux à ceux des métropoles.

Aujourd’hui, il est évident que les magistrats veulent affirmer leur main-mise sur la société. Du plus petit tribunal administratif de province jusqu’au Conseil d’État, ils veulent tout régenter. Ils contrôlent l’exécutif, remplacent le législatif et vont jusqu’à arbitrer les comportements politiques et sociaux, et cela sans recours d’aucune sorte. Le juge n’a de compte à rendre à personne, il s’autogère et se pose rarement la question des conséquences de ses décisions. Oser dire ceci me vaudra peut-être d’avoir ma photo sur le « mur des cons » puisque c’est là toute la considération que certains juges ont pour le peuple au nom duquel ils rendent pourtant la justice.

Comment et pourquoi avons-nous laissé filer notre souveraineté entre leurs mains ? Les juges et ceux qui les soutiennent utilisent à tout va la notion « d’état de droit » pour se prévaloir de leur position prééminente mais ce fameux état de droit n’est aujourd’hui qu’un instrument destiné à affaiblir la seule souveraineté qui vaille, celle du peuple. Le général De Gaulle le disait très clairement et rappelait la hiérarchie des valeurs : « Souvenez-vous de ceci : il y a d’abord la France, ensuite l’État, enfin, autant que les intérêts majeurs des deux sont sauvegardés, le Droit.« 


  1. Arrêté du 28 août 2025 relatif à la capture de l’alouette des champs à l’aide de pantes dans les départements de la Gironde, des Landes, du Lot-et-Garonne et des Pyrénées-Atlantiques ↩︎
  2. Christophe Guilluy. Interview Chasses Internationales n°38. ↩︎

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9 commentaires sur « Quand les juges attaquent notre identité »

  1. Le temps de la révolte est venu ; En réalité la révolte aurai déjà du avoir lieu….mais les dirigeants de la chasse française n’en ont pas voulu, sur de leurs appuis politique. Pourtant, rien n’est moins sur qu’un appuis politique, ceux qui l’on pratiqué le savent trop bien ! quelle naïveté ! La chasse se fait peler comme un oignon, couche par couche, sans que personne ne puisse l’empêcher. Les bras armés des idéologues de gauche et d’extrême gauche anti chasse commencent à comprendre que leur fin approche…..comme une bête qui sait qu’elle va mourir , ils vont mordre très fort avant de mourir….et laisseront des blessures inguérissables

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  2. Bonjour
    Il est temps d’arrêter de nous comporter comme de gentils toutous qui disent amen à tout devant des juges compatissants et une poignée d’idéologues qui mettent à mal nos traditions, nos façons de vivre, la ruralité dans son ensemble…Notre hymne national ne comporte pas un couplet…Aux armes citoyens…

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      1. Je pense qu’une grande manifestation à Paris comme en Février 1998 réunissant le monde rural calmerait les envies de nos détracteurs de tous poils

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  3. Excellente chronique, comme à ton habitude , mon cher Denis.
    On peut effectivement s’étonner du silence assourdissant de beaucoup d’organisations censées défendre la chasse Française.
    Que les chasseurs adhérents en tirent les conclusions qui s’imposent …….

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      1. Qu’ils réfléchissent un peu !! un jour viendra leur tour, et plus personne ne sera là pour les défendre ( éventuellement)

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